
Pourquoi nos ados et nos enfants jouent aux jeux vidéo ? C’est d’abord à cette question qu’a répondu Christophe Butstraen, ancien professeur de sciences et de géographie et médiateur scolaire en Wallonie. Invité au Salon Gris du Centre culturel Spa-Jalhay-Stoumont le 2 mai dernier par le Cercle de Libre Pensée « La Raison » de Spa, Christophe Butstraen, également auteur du très instructif livre « Internet, mes parents, mes profs et moi », a, dans un premier temps, rappelé que le jeu fait partie de l’histoire de l’être humain. C’est tout naturellement qu’il a donc commencé par brosser rapidement l’histoire des jeux vidéo et donné quelques informations utiles à connaître : aujourd’hui, le jeu vidéo est la première industrie culturelle dans le monde, avant la musique et le cinéma ; un jeune de 15 ans passe, en moyenne, 12 heures par semaine à jouer à des jeux vidéo ; l’âge moyen du joueur est de 34 ans ; 51 % des joueurs sont des hommes, contre 49 % de femmes.

Christophe Butstraen a identifié cinq grandes catégories de jeux vidéo : les petits jeux en flash ; les jeux d’argent et de hasard ; les serious games ou « jeux sérieux » ; les socialgames ou jeux sociaux ; les jeux de rôle en ligne massivement multi-joueurs. Ces jeux sont disponibles sur des consoles, des ordinateurs et des smartphones. Ils couvrent une multitude de domaines (sport, combat, stratégie, musique, etc.). Tout le monde peut donc s’y retrouver.

Mais alors, les jeux vidéo rendent-ils nos enfants plus violents ? C’est évidemment LA question que tout le monde se pose. Christophe Butstraen répond qu’il n’existe, à ce jour, aucune étude qui prouve un lien quelconque entre les jeux vidéo violents et la violence dans la vie réelle. En réalité, les jeux vidéo ne créent pas de nouvelles pathologies : ils révèlent simplement celles qui préexistaient et peuvent conduire à leur accélération. Cela dit, on ne peut nier une certaine nervosité et une irritabilité chez les joueurs, notamment quand ils sont frustrés dans leurs habitudes de jeu. De plus, quelques règles identiques à celles qui s’appliquent au visionnage de la télévision doivent s’appliquer : veiller au confort des yeux, à la durée de jeu, etc. Quant à l’épilepsie, il n’est actuellement pas démontré que le jeu vidéo en est une cause directe, même s’il peut être un facteur déclenchant en la matière.

Nier les effets positifs des jeux vidéo serait une erreur : il est démontré qu’ils améliorent la vision d’ensemble, l’attention et la vitesse de réaction, la mémoire à court terme, la capacité à prendre des décisions rapides et à ignorer les distractions, la capacité à passer facilement d’une tâche à l’autre, la créativité dans la réalisation des énigmes et la capacité à gérer une multitude d’informations en même temps. Sans compter le fait que les jeux vidéo sont également un facteur de socialisation, notamment parce qu’ils permettent de jouer avec des amis et des inconnus. Bien évidemment, ces effets bénéfiques ne se produisent que si les jeux vidéo sont utilisés de manière raisonnable, n’empiètent pas sur le travail scolaire et les activités sociales, et s’ils sont adaptés à l’âge des joueurs.

Finalement, comment savoir si nos jeunes sont « addicts » aux jeux vidéo ? Pour répondre à cette question, Christophe Butstraen distingue quatre stades : l’excès (pratique normale mais usage supérieur à l’utilisation habituelle à certains moments), l’abus (comportement qui devient préoccupant et qui se manifeste par un basculement dans l’ordre des priorités habituelles, comme arriver en retard aux repas, des résultats scolaires irréguliers, etc.), la compulsion (comportement pathologique du joueur, qui ne maîtrise plus ses « pulsions » et ne peut s’empêcher de jouer) et la dépendance ou addiction. Cette dépendance pathologique ne concerne qu’une minorité de jeunes.

Si beaucoup d’entre nous jouent à des jeux vidéo, nous n’en sommes pas tous au même stade. Là aussi, quatre catégories principales peuvent être distinguées : les abstinents (ceux qui ne jouent pas et ont peu de connaissances en la matière) ; les occasionnels (ceux qui jouent quelques fois par semaine et pour de courtes périodes) ; les abondants (ceux qui jouent beaucoup mais pour qui le jeu n’est pas le centre de leur vie) ; les excessifs (ceux pour qui le jeu est le centre de leur vie et passe avant tout le reste).

Pour terminer, Christophe Butstraen a prodigué douze conseils bien utiles à destination des parents et grands-parents, afin de gérer en famille et au quotidien l’utilisation des jeux vidéo : respecter la règle 3-6-9-12 ; jouer avec ses enfants ; fixer les règles avant ; avoir des règles identiques partout dans la famille ; s’informer sur les jeux avant de les acheter ; respecter la recommandation PEGI ; utiliser les verrous et contrôles parentaux ; tester les jeux avant de les acheter ; avant 15 ans, éviter les tablettes, consoles et ordinateurs dans les chambres ; fixer un temps limite quotidien ou hebdomadaire ; empêcher l’accès aux systèmes de paiement en ligne ; proposer d’autres activités.

Et Christophe Butstraen de conclure très justement : « Dans tous les cas, n’oubliez pas que c’est vous qui avez le dernier mot ! »

Une conférence passionnante de bout en bout, avec un excellent orateur !